dimanche 3 mars 2019

Un nouveau pavillon d’entrée pour le musée de Cluny


vue depuis le départ de la rue du Sommerard avec les thermes à gauche



entrée du pavillon et bâtiment XIXe rénové



la façade latérale en détail: claustras et plaques d’aluminium

Par hasard, je suis tombé sur la nouvelle, plus vraiment nouvelle, que le musée du Moyen-âge à Paris ou musée de Cluny, au croisement des boulevards Saint-Michel et Saint-Germain, était en travaux. De fait, les Thermes gallo-romains qui font en partie l’intérêt de ce lieu (Ier siècle de notre ère) ont été restaurés et un pavillon moderne construit, conduisant aussi bien à la visite des Thermes que du musée, sis dans le charmant hôtel de Cluny et sa décoration gothique flamboyant (fin XVe siècle), résidence autrefois des abbés de Cluny.

Pour autant que je m’en souvienne, l’entrée se faisait auparavant par la rue du Sommerard, à travers un porche médiéval aux angles arrondis donnant dans la cour. Un mur crénelé cache en effet cette petite cour qui donne toute la mesure de la décoration médiévale: voussures pincées des portes donnant sur un développement floral, colonnettes finement ouvragées, fenêtres à meneaux encadrées par d’étroites voussures droites se croisant aux angles, cernées encore au-dessus par une moulure en forme de grecque, balustrade à motif végétal ajouré, lucarnes à pignon et pinacles. Certes, au départ de la rue du Sommerard, il y avait les Thermes d’un côté, une cour reposant sur un soubassement antique et un bâtiment XIXe en briques imitant les thermes, pas terriblement engageant. Le pavillon est donc venu sur la cour provoquer l’intérêt du passant.

Inauguré en juillet dernier, le pavillon en effet ne semble pas évident. On se demande: Qu’est-ce que c’est? C’est une surface à deux pignons, brun métallique, sans cohérence symétrique, avec des ouvertures brutes verticales, toutes voilées et grillagées sauf une, près de la rue. Pas de séparation, pas de moulure, pas de corniche ni de volets. Au rez-de-chaussée, si lon veut, une grande vitrine suivie dune porte brute elle aussi donnent sur une rampe daccès aux Thermes par lextérieur mais à vue de piéton, lensemble également est voilé par lantique grille de la rue. On pourrait dire alors que la discrétion, le désordre apparent, la timidité des lieux attirent le passant.

L’architecte Bernard Desmoulin, dans la cinquantaine, ne semble pas très original; comme d’autres, il privilégie la lumière, la dématérialité et même la déconstruction esthétique, la matière brute. La matière recule pour mieux se faire voir comme les panneaux métalliques désordonnés qui composent la façade latérale. "Une sorte de patine" explique t-il. Lensemble est, cest vrai, étonnamment intégré à son environnement, en tous cas sur les photos et cest peut-être ça, la réussite de lentreprise: une architecture déstructurée mais qui ne choque plus, ne revendique rien, une architecture qui se voudrait presque comme la continuité sculptée ou esthétique de lensemble environnant. (1) Finalement, à force de déconstruction, larchitecture retrouverait son sens dans le pur décor architectural.

Il se pourrait aussi qu’il y ait des effets lumineux sur la surface, chose que j’apercevrais uniquement sur place. Lorsqu’on approche l’oeil, sur les photos en tous cas, le soi-disant grillage en aluminium est un claustra qui reprend le motif végétal de la balustrade de la cour. Leffet intérieur doit être saisissant. Le ton brun, la surface burinée des plaques métalliques poursuivent la décoration par paires dassises alternativement ocre et brune des vieux thermes, comme si dailleurs, ces plaques de taille et de forme diverses étaient la représentation grossie dune seule couche de briques. Le souci environnemental au sens architectural, invoqué depuis de nombreuses années, a donc ici été pleinement pris en compte.

La fameuse tenture de la Dame à la licorne (déb. XVIe s.) est présentée dans le pavillon en attendant la réouverture du musée lui-même dont on change laménagement. Enfin on réaménage aussi le jardin côté boulevard Saint-Germain pour une réouverture en 2020. Affaire à suivre.


(1) à l’inverse du musée du quai Branly, par exemple (Jean Nouvel, 2006).

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