samedi 2 mars 2024

Voyages d'un philosophe aux pays des libertés (2)


Le Kérala, paradis pour bobos décontractés?

    Il n’y a aucun génie des peuples chez G. KeonigEn Finlande, il ne voit pas que l’ex-détenu devenu professeur de criminologie est un Nigérian (1) ; ça lui évite de se pencher sur l’échec complet de l’immigration extra-européenne dans les pays scandinaves et ailleurs. Si l’on avait inversé les deux systèmes, tout simplement, dit-il page 223, l’Amérique du nord propriétaire serait devenue l’Amérique du sud rentière et pauvre et vice versa. Il poursuit donc la chimère de l’être abstrait chère aux philosophes illuminés du XVIIIe siècle. Pour lui-même, il se définit comme français (de langue surtout), londonien, normand, athée, orthodoxe roumain (de par sa femme) ; l’individu ne serait in fine que l’addition de ces « appartenances singulières », dont la « diffraction » serait même, la garantie « d’une tolérance de tous les instants. » (2) En somme, d’une non-définition, d’un étalage fumeux réservé à une élite, « quelques happy few des milieux économiques et artistiques » comme il le dit du sentiment cosmopolitique étendu de Stefan Sweig d’avant la Grande guerre, il fonde un principe général, comme si toute la France, en passant, habitait Londres et écrivait aussi bien que lui. Il oublie encore une fois que le cosmopolitisme d’avant-guerre était fondé sur la suprématie culturelle européenne comme le faux cosmopolitisme antiraciste actuel est l’alibi de regroupements « frileux » sur base socio-raciale. (3)

« La société ouverte n’est pas aisée » dit-il. Toute son argumentation semble être de la promouvoir par des moyens réfléchis sans nécessairement nier la tendance lourde de la majorité qui se reconnaît dans ses à priori sociaux et politiques, y compris la gauche, qui après avoir provoqué les conditions de cette mise en péril de la majorité, sa fragilité, défend un « statut figé » du féminisme et de l’antiracisme, autrement dit un « discours essentialiste », voire racialiste. L’idéologue chez G. Koenig ne prend pas le pas sur l’intellectuel : c’est une grande qualité. Certaines des expériences qu’il préconise pourraient s’avérer fructueuses, à petite échelle. Le chemin des drogues est une réussite semble t-il, au Colorado mais un  désastre à San Francisco (où la vente de cannabis est devenue légale). Qui sait si le régime libéral des cultes du Kérala (dix-sept langues, des milliers de dialectes) ne tournerait pas à la catastrophe dans n’importe quelle autre partie du monde ou même de l’Inde ? Pourquoi devrait-il donc y avoir une généralisation de ces expériences, au prétexte qu’elles marchent quelque part ?

    Comment fait-on et fait-il pour passer du stade libéral voire libertaire, individuel et utilitariste, pierre angulaire de sa pensée, au stade du "village global" et de "l'unification de l'humanité" à la Kant? Lui-même ne le dit pas. Aurait-il senti la perte de sens vertigineuse qu'implique sa conception plate et horizontale de la société? "La quête de sens surgit lorsque se profile la pure diversité, qui est séparation, scission et incohérence." (PA. Taguieff)

A suivre par la lecture d'autres ouvrages de G. Koenig.

(1) Dont la thèse est en anglais, du reste.

(2) Son attachement normand ou son athéisme ont-ils produit la carte Vitale qu'il utilise peut-être, retour en France ou son permis de conduire?

(3) Comment ne s’en rend-il même pas compte à Londres, ville absolument ségréguée sur les plans social et racial, aussi bien du côté des arrivants que des vieux-Anglais ?

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